Conférence de presse

Aucun projet ne peut être gagnant quand il saccage tout un quartier

Ecolo et des riverains introduisent un recours au conseil d’Etat

Quand les tentatives de dialogue restent improductives, il faut passer à l’action. C’est ce qu’Ecolo Verviers, des riverains et commerçants d’Hodimont ont décidé de faire en introduisant un recours au conseil d’Etat contre le permis d’urbanisme accordé à la S.A Les Rives de Verviers. Verviers a besoin d’un projet gagnant, mais celui-ci ne peut en aucun cas se réaliser au détriment de tout un quartier.

Il s’agit d’un premier recours. D’autres suivront si la majorité communale et le promoteur continuent à ne pas vouloir écouter les milliers de personnes qui réclament davantage de concertation et de prise en compte de leurs besoins dans toutes décisions.

1. L’action posée par les requérants

Six requérants ont déposé le 21 août dernier un premier recours au conseil d’Etat contre le permis d’urbanisme accordé à la S.A. Les Rives de Verviers. Ce permis doit permettre à la S.A. Les Rives de Verviers de démolir le rond-point Parotte (baptisé square André Damseaux), de créer un nouveau rond- point au carrefour des rues St Antoine – Hodimont- Commerce, et de supprimer le parking de 60 places de la rue St Antoine – tout en faisant de cette rue actuellement à deux voies un boulevard large de 5 voies (2 de stationnement et 3 de circulation).

2. Pour Ecolo : une continuité dans la démarche

Ecolo s’est positionné d’emblée contre cet aménagement de voiries à Hodimont, et en cela parle d’une même voix que les commerçants et habitants du quartier qui se sont mobilisés en nombre lors de l’enquête publique concernant ce permis.
Que ce soit dans les débats ou les votes au conseil communal (schéma de structure, nouveau plan communal de mobilité), dans les contacts d’ouverture avec la majorité, dans le cadre des diverses enquêtes publiques (sur le permis attaqué, sur le PCM, sur le permis unique, etc.), Ecolo et ses mandataires n’ont eu de cesse de pointer, d’expliciter les divers aspects néfastes du projet pour le développement urbanistique de Verviers, et particulièrement pour le quartier de Hodimont. Ecolo a toujours voulu faire des propositions alternatives. Force est de constater qu’il reste toujours difficile, voire impossible de se faire entendre à Verviers.

D’après la majorité, si nos remarques sont jugées parfois pertinentes, elles ne peuvent être appliquées qu’en correction a posteriori d’un projet qui ne peut plus être changé. On donne les permis, on corrige les erreurs après.
Ecolo n’est pas le seul à s’exprimer dans le vide. De nombreux riverains se plaignaient également de ne pas être entendus dans leurs remarques et doléances lors des différentes procédures, officielles ou non. Les légitimes revendications citoyennes sont systématiquement décrédibilisées.

Face à cette situation, Ecolo avait deux solutions : baisser les bras ou continuer à s’opposer à des projets qu’il juge néfastes pour Verviers. C’est clairement cette deuxième option que nous avons choisie le 21 août et que nous vous présentons aujourd’hui. Parce que nous voulons arriver à un autre projet positif pour Verviers, ses habitants et commerçants, futurs et actuels.

3. Les différents dommages de ce permis pour Hodimont

Le principal dommage serait la création d’une scission sociale supplémentaire dans le quartier : traverser une voie à 2 bandes adossée à un parking boisé est plus aisé que de traverser une autoroute urbaine de 5 voies (3 de circulation et 2 parkings). Le dégagement visuel induit – conduisant naturellement à un conduite automobile plus rapide -, l’élargissement des voiries, la suppression d’un rond-point, l’augmentation du trafic, tout concours à rendre plus invivable ce quartier.

Hodimont est un quartier populaire et très peuplé. Peu de maisons disposent d’un jardin privé : beaucoup d’enfants sont donc dehors dès qu’il fait beau. Déjà dans l’état actuel, la traversée de la rue de Hodimont et de la rue St Antoine est périlleuse. Nous ne pouvons admettre qu’au nom d’intérêts privés, on sacrifie plus encore ce quartier au profit de la « revitalisation » très hasardeuse de la rue Spintay. Les personnes qui habitent ce quartier ont droit à la même considération que quiconque… Il semble malheureusement nécessaire de rappeler cette évidence.

Le concept de « mobilité douce » n’est pas une idée de luxe qui doit être réservée à certaines artères commerçantes. Au contraire, c’est sans doute davantage dans les quartiers populaires, à forte densité de population, que la mobilité douce prend tout son sens. Si l’aménagement projeté devait être réalisé, si le centre commercial de Foruminvest devait voir le jour, et si ce centre fonctionnait bien, nous aurions à travers Hodimont une véritable autoroute d’accès aux flux incessants… D’où, bien entendu : nuisances sonores, pollution accrue, manque de parking, problèmes évidents de sécurité, etc.

Cet aménagement entraînerait la perte de 41 places de parking. Ce n’est pas anodin dans un quartier où sont situés de nombreux petits commerces « de proximité ». Ces commerces font partie intégrante de la vie et de la vitalité du quartier. Leur viabilité doit être un souci permanent dans toute opération urbaine.

Enfin, il faut remarquer que les rares arbres du quartier sont situés sur le parking qui serait supprimé.

En conclusion : si nous partageons l’objectif d’une revitalisation commerciale de Verviers, nous ne pouvons accepter qu’on sacrifie tout un quartier pour réaliser un centre commercial dont la conception est pour le moins discutable ! Si le projet des promoteurs ne peut se réaliser qu’au prix de la dévastation d’un quartier historique de Verviers, c’est que ce projet est mauvais pour notre ville…. C’est bien l’intérêt collectif qui doit être le guide dans toutes opérations de réaménagement de l’espace public.

4. L’argumentation du recours

Ce permis est attaquable sous différents aspects. Parmi ceux-ci, citons :

– l’art 1er, § 1 du CWATUPE stipule : « Le territoire de la Région wallonne est un patrimoine commun de ses habitants. La Région et les autres autorités publiques, chacune dans le cadre de ses compétences et en coordination avec la Région, sont gestionnaires et garantes de l’aménagement du territoire. Elles rencontrent de manière durable les besoins sociaux, économiques, énergétiques, de mobilité, patrimoniaux et environnementaux de la collectivité par la gestion qualitative du cadre de vie, par l’utilisation parcimonieuse du sol et de ses ressources, …. ».

Or, le moins que l’on puisse dire, c’est que les intérêts de la collectivité (et singulièrement ceux des habitants du quartier) sont ici ignorés au seul bénéfice d’une société commerciale.

– ce permis est sollicité par « Les Rives de Verviers », c’est-à-dire par ForumInvest. Il s’agit donc bel et bien du même projet de centre commercial. Et donc cet aménagement de la voirie publique devrait être intégré dans la demande de permis unique… Le projet a bel et bien été « saucissonné » ! Or le CWATUPE précise bien que, si un projet nécessite des modifications de voirie, ces modifications doivent faire partie du même dossier.

– cet aménagement est en contradiction avec le PCM récemment adopté. Parmi les objectifs du PCM, on trouve :
• limiter la ‘pression’ de la voiture
• développer le rôle des transports collectifs
• encourager les modes ‘doux’
• assurer la sécurité dans les déplacements
• renforcer la viabilité économique
• mieux partager l’espace public entre les différents modes de déplacements
• embellir la cité.

Le permis attaqué va totalement et radicalement à l’encontre de ces objectifs.

En outre, dans le rapport d’incidences environnementales du PCM, le passage de 2 à 5 bandes de la rue St Antoine n’est pas pris en considération.

– Le citoyen ne s’y retrouve plus dans les déclarations des responsables. Cet aménagement de la voirie a été présenté par le bourgmestre (dans la presse et lors de la réunion de clôture) comme étant une demande des TEC et du SPW. Le SPW, le Ministre Daerden et le Ministre Lutgen écrivent tous qu’il s’agit d’un besoin du projet Foruminvest, financé par celui-ci comme charge d’urbanisme. Le permis est d’ailleurs accordé à la s.a. Les Rives de Verviers ! Lors de la réunion de clôture de l’enquête publique, le bourgmestre s’est engagé à plusieurs reprises à répercuter au comité de suivi du PCM les remarques formulées entre autres par les commerçants et habitants du quartier. Les PV des réunions suivantes montrent qu’il n’en a rien fait. Les principes de bonne gouvernance et de légitime confiance sont donc une fois de plus violés.

5. Conclusions

La démarche d’Ecolo et des riverains se veut positive : arrêter le présent projet, pour arriver à une nouvelle mouture qui prenne réellement en compte les problèmes de mobilité, qui permette de préserver et développer l’attractivité de Verviers. Pas seulement pour les chalands d’un jour, mais aussi et d’abord pour les habitants actuels et futurs, en construisant un cadre de vie agréable en centre-ville, notamment en bords de Vesdre, mais aussi à Hodimont !
Cette vision n’empêche pas un centre commercial. Mais celui-ci doit dégager la Vesdre, disposer d’un jeu de parkings disposés autour de l’hyper centre de façon à servir tous les commerces existants et les divers habitants du centre-ville tout en permettant de diminuer le flux automobile. Il doit être un stimulant pour le commerce existant, pas un vampire.
C’est dans cette optique que nous refusons les aménagements prévus à Hodimont.

On le sait depuis longtemps : d’autres démarches d’opposants, nombreuses et variées, bloqueront la suite de la procédure. Il faut bien comprendre cette démarche comme un appel à la raison, à la construction commune d’un vrai projet gagnant pour Verviers. Fermer les yeux sur les nombreux défauts du projet et sur les mécanismes opaques de « saucissonnage » du dossier utilisés par ses promoteurs (publics et privés), équivaut à foncer droit dans le mur. Ecolo s’y oppose et luttera par tous les moyens possibles pour offrir à Verviers et ses habitants un cadre de vie adapté et respectueux de ses besoins.